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La Flotte de l'Ordre du Temple

✠ La Flotte de l'Ordre du Temple
Marine Templière créée dès la seconde croisade pour les expéditions en Terre Sainte

Après la première croisade et la création des États latins d'Orient, les Templiers accorderont beaucoup d'importance aux transports maritimes en affrétant des navires Génois et Pisans puis en se dotant d'une flotte marchande.

Marine marchande et Marine de guerre

galère

Galère

galéasse
Galéasse

Dès 1103 et pendant 20 années environ, l'Ordre du Temple a loué des navires marchands afin d'acheminer en Terre Sainte Pèlerins, victuailles, matériels, matériaux, animaux etc... Vers 1125 l'Ordre décida de bâtir des Commanderies Templières côtières afin de servir de comptoirs marchands pour les échanges entre la France et le proche orient.

Les bateaux Templiers battaient pavillon "templier" voiles blanches et croix pattée rouge, ils étaient de grande capacité mais naviguaient uniquement le long des cotes. Les matières premières comme l'huile le sel le vin les céréales les métaux circulaient entre la France l'Allemagne l'Italie le Portugal l'Espagne la Belgique les Pays Bas l'Ecosse la Grèce Chypre la Judée la Samarie etc....

Leur port d'attache est Acre, ville fortifiée bâtie sur une langue de terre offrant une excellente protection par son double port.

Liste non exhaustive des navires possédés par les templiers :
 Le Templère livré en 1230, reliant l'Angleterre au continent
 Le Buscart livré en 1230, reliant l'Angleterre au continent
 Le Buszarde du Temple livré en 1230, reliant l'Angleterre au continent
 La Bonne Aventure livré en 1288 basé à Marseille
 La Rose du Temple livré en 1290 basé à Marseille.

C'est à partir de ce port que le commandeur du Passage était chargé d'écouler en Orient les hommes et matériels de l'Ordre
 La Bénite, en latin "Sanctus", affrétée par Jean Ier de Dreux en 1248 et basé à Barfleur
 L'Angellica basé à Brindisi en Italie du sud
 La Santa Anna, qui se trouvait en 1302 à Famagouste (Chypre), et qui était nolisée (affretée) à des marchands occidentaux
 Le Faucon ou ( la Falcon Templum ), à ne pas confondre avec un navire hospitalier de même nom basé à Saint-Jean-d’Acre, d'une capacité de transport de 1 500 personnes, qui se trouvait également à Famagouste (Chypre) en 1301. Sous le commandement de Roger de Flor, il participa à l'évacuation en 1291 de la population civile d'Acre, lors de la chute du siège de l'Ordre. Il fut désarmé à Marseille, lors de la fuite de Roger de Flor, accusé par Jacques de Molay d'avoir détourné à son profit une partie des trésors sauvés avec la population.
 L'Olivette, acheté en 1301 par Roger de Flor, toujours templier et conseiller de Frédéric II de Sicile.
 La Mestre Galie, vaisseau amiral de l'Ordre à partir de 1248, abritait dans sa cale les dépôts réguliers des participants de la croisade, et avait semblerait-il un pont blindé et ignifugé.
 L'Allégresse navire de guerre livré en 1270 ayant participé à la huitième croisade basé à Collioure.
 La Nave Angélique navire de guerre livré en 1270 ayant participé à la huitième croisade basé à Collioure.
 La Sainte Trinité : en septembre 1306, trois contrats concernaient ce navire pour un voyage entre Marseille et les Pouilles.
 Six Galères livrées en 1293 par Venise, venues compléter les deux vaisseaux dont ils disposaient déjà à Chypre, pour assurer la protection de l’île.

Ports d'attache des templiers :
Au nord, les templiers utilisèrent les ports de Boulogne, Barfleur, ainsi que les ports des villes flamandes.

galère

Galère

La Rochelle fut également utilisée, mais ce port aurait eu un statut particulier, principalement pour des liaisons commerciales avec l'Angleterre et la Flandre. Les principaux pouvoirs du royaume de Jérusalem sont représentés à Acre, mais, après la prise de Jérusalem par Saladin en 1187, la ville devient le nouveau quartier général des Templiers en Terre sainte. Selon le chroniqueur du XIII ème siècle connu sous le nom de Templier de Tyr, "Le temple était l'endroit le plus solide de la ville, dont une grande partie était au bord de la mer, comme un château. À l'entrée figurait une grande tour robuste dont les murs faisaient 8 mètres d'épaisseur". Il mentionne également une autre tour, bâtie si près de la mer que les vagues déferlaient contre elle, "dans laquelle était conservé le trésor du Temple". Après 1218, les Templiers agrandissent leurs infrastructures à Acre en se dotant d'une nouvelle forteresse, à une cinquantaine de kilomètres au sud. Aujourd'hui connue sous le nom d'Athlit, les Templiers l'appellent Chastel Pèlerin car elle a été construite sur un promontoire rocheux avec l'aide des pèlerins (notamment le chevalier Gauthier d'Avesnes). Selon un pèlerin germain qui le visite au début des années 1280, ce château "est situé au cœur de la mer, fortifié par des murs, remparts et barbacanes si solides et crénelés que le monde entier ne suffirait pas pour le prendre". Depuis leurs ports d'Outremer, les navires des Templiers voguent vers l'ouest. En France, l'un de leur principal port d'attache est Marseille, où ils chargent pèlerins et marchands avant de mettre le cap vers l'est. Les ports italiens de l'Adriatique sont également importants, surtout Brindisi, qui présente l'avantage d'être proche de Rome. À Bari et Brindisi, on trouve du blé, des chevaux, des armes, des vêtements, de l'huile d'olive, du vin et de pèlerins. Messine, en Sicile, sert à la fois de circuit d'exportation depuis le continent et d'entrepôt pour les cargaisons provenant de Catalogne et de Provence. Les Templiers construisent également des navires dans les ports européens, partout entre l'Espagne et la côte dalmate.

Activité méconnue des templiers :
Une activité méconnue des templiers était le commerce des esclaves blancs : des prisonniers de guerre, des enfants achetés à leurs parents, étaient transportés en grand nombre de l'Orient vers l'Occident. Ils participaient au fonctionnement des Maisons du Temple, principalement en Italie et en Aragon. À la fin du XIIIèmesiècle, la plaque tournante de ce commerce florissant était le port d'Ayas du Royaume arménien de Cilicie. Les Templiers y ouvrirent un comptoir vers 1270, et y firent le commerce d'esclaves turcs, grecs, russes et circassiens.

Découvertes Archéologiques (04/01/2017) :
Des archéologues marins de l'Université d'Haifa, le professeur Michal Artzy et le Dr Ehud Galili, ont mené les investigations sur l'épave des Templiers. Le navire a subi des dommages lorsque le port moderne d'Acre a été dragué pendant sa construction et ce qui reste de l'épave sont des planches en bois recouvertes de ballast, la charpente du navire et quelques morceaux de sa coque. La datation au carbone14 a révélé que le bois utilisé pour construire la coque date de 1062 à 1250 de l'Ere Commune, ce qui cadre avec les activités des Templiers dans la région. En plus des pièces d'or trouvées près de l'épave, les archéologues marins ont aussi découvert des bols et jarres en céramique importés du sud de l'Italie, de Syrie et de Chypre. A ces trouvailles s'ajoutent des morceaux de fer corrodés, principalement des clous et des ancres. La découverte la plus importante cependant, reste les pièces d'or trouvées dans l'épave. Au total, ce sont 30 florins qui ont été découverts, d'après Robert Kool expert en pièces de monnaie de l'Autorité des antiquité d'Israël. Les florins ont été frappés à partir de 1252 dans la république italienne de Florence (d'où les monnaies tirent leur nom).

Les spéculations sur ce naufrage sont étroitement liées au siège de la ville d'Acre.

En effet, des témoins oculaires de l'événement rapportèrent que des nobles et des marchands prirent la fuite par bateau de la forteresse assiégée, souvent après avoir soudoyé les propriétaires de ces bateaux avec des objets de valeur. Mais beaucoup ne sont jamais sortis du port et auraient coulé avec leurs richesses, alors que les défenseurs chrétiens cherchaient à gagner du temps pour organiser leur fuite.

Siège Saint-Jean d'Acre 1291

La forteresse des Croisés tomba le 18 Mai 1291, après plus de 100 ans de domination Franque.

Les derniers défenseurs, un contingent de Chevaliers du Temple, refusèrent d'abandonner leurs positions. Aussi, lorsque les sapeurs Mamelouks affaiblirent les murs de la forteresse des Templiers, l'édifice s'écroula entièrement, tuant les derniers défenseurs, ainsi qu'une centaine des soldats du sultan.

tunnels à saint-jean d'acre

Tunnels à Saint-Jean d'Acre

La chute d'Acre fut le dernier évènement marquant des croisades chrétiennes lors de la période médiévale. Une fois la forteresse prise par les Mamelouks et sommairement détruite, l'église catholique et la noblesse européenne qui la supportait abandonnèrent leur quête visant à libérer ce qu'ils considéraient comme leur terre sainte.

Que sont devenus les navires de l'Ordre du Temple après 1307 ?
Personne à ce jour ne sait précisément ce qu'est devenue la flotte Templière après 1307, les navires se sont volatilisés. Les historiens en sont donc réduits à formuler deux hypothèses :

La première
- une partie de la flotte se mit au service du Temple du Portugal ou serait partie à la découverte du nouveau monde deux siècles avant Christophe Colomb.
- l'autre partie se serait mise au service du roi d'Ecosse Robert le Bruce pour combattre les Anglais.

La seconde
- elle serait devenue une force navale clandestine, cherchant vengeance en s'attaquant presque exclusivement aux navires de l'Église Romaine, ou à ceux des pays ayant soutenu l'arrestation des templiers. Ces navires portant le pavillon Jolly Roger, auraient ainsi considérablement fait augmenter la piraterie à cette époque, en Atlantique, Manche, Mer du Nord et Méditerranée. Ce pavillon aurait pour origine Roger II de Sicile (1095 - 1154), lui-même surnommé "Jolly Roger" : celui-ci l'aurait hissé lors du schisme Anaclet II (anti-pape) / Innocent II, et de son combat contre les forces papales. Il aurait été désigné patron de La flotte de l'Ordre du Temple par les capitaines de navires templiers qui étaient tous parvenus à s'échapper.

De nos jours sur les océans
Ces deux mondes Chrétiens et Musulmans, à partir du XIVème siécle ne se confronteront plus qu'en matière commerciale. D'autres batailles verront le jour, celles du commerce maritime, et les croix Templières flotteront encore pendant plusieurs siècles, jusqu'à nos jours, sur tous les océans et mers du monde.

Marine Templière de guerre - Transport des troupes
La 3ème croisade

Si les deux premières croisades furent exclusivement terrestres, la troisième croisade (1189-1192) fut pour la première fois terrestre et navale. Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste prirent en effet la mer, après avoir acheté ou loué des navires. C’est la première fois que de grands rassemblements de navires nordiques pénètraient en Méditerranée. C’est aussi la première grande entreprise maritime des Francs qui ouvrit la série des croisades maritimes. Il ne s’agissait plus, comme au XII èmesiècle de porter secours au royaume de Jérusalem avec quelques centaines de chevaliers, mais de conquérir des villes gardées par d’imposantes murailles, et donc de transporter par voie de mer de véritables armées, ce qui n’avait encore jamais été fait sur de pareilles distances. Les nefs, construites à Venise, Gênes et Marseille, devinrent de plus en plus imposantes, capables de porter plusieurs centaines d’hommes et leurs chevaux.

La 4ème croisade
La quatrième croisade (1202-1204) fut exclusivement maritime et à forts effectifs français, mais seules les villes italiennes étaient à même de fournir la flotte de transport.

La 5ème croisade
La cinquième croisade (1217-1221) se fit avec une très faible participation française, le royaume étant accaparé par la lutte contre les Albigeois. C'est pourtant à partir de cette période que l'ensemble des navires appartenant à l'Ordre du Temple peut être réellement considéré comme une flotte. Lors du siège de Damiette en août 1218 ont participé 4 "Koggen" et 2 nefs équipés par les Templiers et les Hospitaliers. L'un des navires du Temple fut même sacrifié en novembre 1218 : précipité contre les murailles de la ville, il entraina avec lui un grand nombre d'assaillants musulmans. Les sources soulignent que le sabordage du navire décrété par les templiers après son abordage par une centaine de fedayins, que l’Estoire d’Eracles porte à plus de deux milliers. Le naufrage du navire entraîna, quoiqu’il en soit, dans les profondeurs du fleuve plus de combattants que les glaives des templiers n’auraient pu en tuer selon le témoignage des chroniqueurs latins. Un récit moins favorable signale qu’un groupe de templiers serait parvenu à traverser «avec l’aide du Seigneur» le fleuve, à bord d’une barque et d’une galère arrachées aux Sarrasins, en convainquant le sultan de couler sa flotte et de fortifier la rive par toutes sortes de lices et de mangonneaux. Le Temple assurait pourtant à cette date un rôle primordial dans le déroulement des opérations après avoir édifié un pont de bateaux entre la tour, récemment conquise, et la rive ouest du fleuve. Sa polyvalence lui permettait de reconvertir certains de ses équipages privés de navire en servants d’artillerie, comme cela advint au mois d’avril 1219. La pierrière qui bénéficia de ce surcroît de main d’œuvre fit preuve de tant de précision que les assiégés lui conférèrent le surnom évocateur de culbuteur ou al-mufrita. La progression de l’ost de la croisade se heurta en août 1219 à un cruel manque de vent qui empêchait les galères chrétiennes de ravitailler convenablement l’armée. Le Temple eut l’intelligence de recourir à des navires d’un plus faible tirant d’eau afin de s’adapter à la navigation estivale dans le Delta. La capture d’une de ses galiotes chargée de 50 balistes en août 1221 préfigura l’humiliante capitulation de Baramun, imposée par la tournure des événements. Les exploits navals des templiers, qui panachaient leurs équipages de croisés occidentaux, ne manquèrent pas de générer une abondante littérature dominée par la figure d’un Liber Templariorum.

La 6ème croisade
C'est une expédition organisée par l'empereur romain germanique Frédéric II pour reconquérir les territoires du royaume de Jérusalem perdus depuis la conquête par Saladin, ainsi que sa capitale. C'est un succès pour les Croisés, mais ses objectifs sont atteints par la diplomatie d’un empereur excommunié plutôt que par les combats, au grand désespoir de la Chrétienté. Cette méthode a créé un précédent qui influencera les Croisades suivantes. L’intervention de Frédéric II a cependant été désastreuse pour les institutions du royaume de Jérusalem qui, se retrouvant sans roi, manque désormais d’un pouvoir central et se retrouve en proie à l’anarchie, les différentes factions (les barons, les ordres de chevalerie, les compagnies maritimes commerciales) ayant chacune sa propre politique sans qu’un souverain puisse arbitrer leurs querelles.

La 7ème croisade
Il fallut cependant attendre la Septième croisade pour que le Temple se dotât d’un vaisseau amiral, que Jean de Joinville visita au moment du paiement de la rançon de saint Louis au mois de mai 1250. Cette Mestre Galie présentait les traits d’une banque flottante, abritant dans sa cale les dépôts réguliers des participants de la croisade. Ce navire devait ressembler à l’impressionnante galère de Jean de Jaffa, qui avait frappé les esprits des croisés, un peu plus tôt, par la peinture intégrale de sa coque et le renforcement de ses flancs à l’aide de 300 targes. Celles du Temple devaient arborer le gonfanon baussant de l’Ordre et employer un nombre incalculable de prisonniers de guerre. Nous savons, grâce à la chronique dite du «Templier de Tyr», que le grand maître Guillaume de Beaujeu n’hésita pas à armer, en 1279, treize de ces galées afin de porter la guerre dans le comté de Tripoli à l’occasion d’une crise féodale. Le corps expéditionnaire qu’il transborda se risqua à gravir les contreforts du Liban pour défaire l’armée comtale à plus de mille mètres d’altitude dans le casal d’ad-Duma. La flotte templière opéra par la suite une démonstration de force devant Tripoli avant de perdre cinq navires dans une tempête inopinée. Les équipages des galères reçurent l’aide inespérée de leur allié Guy de Gibelet, qui était venu mettre le siège devant le château de Néphin (aujourd'hui:Enfé) avec un contingent Templier. L’échec de cette entreprise amena Guillaume de Beaujeu à regagner incontinent Acre ,tandis que Bohémond VII d’Antioche razziait l’île d’al-Hlalıyé, au large de Sidon, avec le soutien d’une quinzaine de galères. Il est peu probable que ces navires aient réussi à prendre le contrôle du Château de Mer, situé plus au sud, qui ne fut abandonné par les templiers que le 14 juillet 1291 sous la pression des Mamelouks. La flotte templière prit le soin à cette occasion d’évacuer la population de la ville, réfugiée sur l’îlot d’al-Hlalıyé. Ces péripéties mettent en évidence l’extrême mobilité du Temple, au même titre que l’instabilité récurrente de la Syrie Franque à la veille de sa chute.

Derniers engagements au Proche Orient
Les rivalités vénéto-génoises compromirent dans les dernières années du siècle la réaction de la Chrétienté en générant, en 1293, un engagement naval au large du Péloponnèse, qui coûta la vie au turcoplier Guillaume de La Tour. L’initiative revint au pape Nicolas IV d’affréter en 1292 une flotte de 20 galères vouées à défendre l’île de Chypre et le royaume de Petite-Arménie contre une éventuelle attaque mamelouke. Les Annales génoises de Jacopo Doria révèlent que cette flotte ne partit qu’après le décès du souverain pontife à la suite d’une insubordination de Manuele Zaccaria et de Tedisio Doria, sanctionnée sévèrement par le podestat en place. Le Sacré Collège, qui gérait les affaires de la Chrétienté par intérim, intervint pour que les deux amiraux fussent autorisés à armer une dizaine de navires destinés à appuyer le Temple et l’Hôpital. Le Grand Conseil consentit à les autoriser à servir en Orient pendant une année au «service de l’Église», après avoir levé l’amende qui les accablait.

Fonctionnement de cette marine
Le Temple choisit cette époque pour se doter d’un arsenal inféodé à un «amiral ou capitaine» temporaire, dans lequel nous pensons distinguer un chef d’escadre (preceptor navium) occasionnel, plutôt qu’un simple patron de nef comme Alain Demurger le suggère. Nicholas Coureas est allé semble-t-il trop loin en accordant à cet office un caractère durable sur le modèle de celui de l’Hôpital, attesté à compter de 1299. L’amiral du Temple devait cependant, à l’instar de son homologue, solliciter l’armement de sa flotte auprès du maréchal du couvent et reverser ses prises de guerre au trésor de l’Ordre. La marine templière, souffrit la même année, d’une convention signée entre la Couronne chypriote et le clergé de l’île au sujet du prélèvement d’une contribution de guerre. Le Temple et l’Hôpital renoncèrent à extrader sur leurs navires des serfs appartenant au roi en ouvrant leurs cales à ses inspecteurs. L’affrètement de leurs bâtiments fit l’objet de plusieurs articles révélant la concurrence représentée par les deux ordres pour les arsenaux royaux. La liberté de manœuvre reconnue aux ordres se heurta à la volonté du roi de concéder des licences d’armement, distribuées au compte-gouttes avant un revirement spectaculaire en 1307. Boniface VIII avait pourtant fait la moitié du chemin en reconnaissant au roi un droit d’embauche prioritaire sur les ressortissants de son royaume, respecté par les templiers. Le pape, après avoir condamné le principe d’une concurrence occulte des ordres, déclara en cas de prise commune comme «juste et équitable» un partage du butin effectué au pro rata du nombre de navires et de participants engagés à bord. Ce partage devait se subordonner à une échelle de valeur favorable légitimement aux combattants. L’immunité des ordres militaires se trouva diminuée par l’obligation d’ouvrir leurs navires à des inspections réglementaires à chaque accostage ou départ, motivées par la recherche d’éléments d’accastillage fréquemment volés. Tout capitaine se dérobant à ce rituel devait faire l’objet de poursuite en cas de disponibilité des baillis royaux. Le Temple s’investit dans les années qui suivirent dans l’interception des navires tentant de commercer avec les infidèles contre la volonté du Saint-Siège. Le commandeur d’Auvergne Humbert Blanc parvint à convaincre Clément V, le 13 juin 1306, de confier le commandement d’un groupe de galères à l’amiral marseillais, Pierre de Lengres, qui reçut des lettres de grâce susceptibles d’être produites dans les ports où il ferait relâche. Il paraît assez ardu d’estimer la taille de l’escadre dirigée par les deux hommes, même si des rumeurs véhiculées durant le procès du Temple font état d’une vingtaine de bâtiments. Pierre de Lengres reçut en tout cas le «le droit de choisir un prêtre adéquat comme confesseur», afin d’absoudre les membres de leur compagnie en indélicatesse avec l’Église. Ce privilège insigne fut réservé à ceux qui s’engageraient à partir en Orient sous un mois, en amendant leurs torts sincèrement. Ces repentis bénéficièrent du privilège appréciable de pouvoir conserver intégralement le produit de leur course, quelle que soit la nationalité des navires interceptés. Les Assises de la cour des Bourgeois réservaient dans les royaumes de Jérusalem et de Chypre un sort expéditif aux trafiquants de produits stratégiques, dont les pécules de plus d’un marc d’argent revenaient au seigneur du lieu. Il est probable qu’Humbert Blanc souhaitait respecter cette procédure pour les contrevenants arraisonnés dans les parages de l’île de Chypre, sans attendre des miracles de la justice royale, soumise aux pressions des républiques italiennes. Cette réorientation des activités du Temple vers la course aurait dû déboucher, dans la pratique, sur l’institutionnalisation de la charge d’amiral, opérée par l’Hôpital en 1300. Cette innovation annonçant le temps des ligues égéennes fut peut-être rejetée par le Temple, dont le conservatisme s’accommodait mal de la vénalité de certains de ses aspects. Aucun autre ordre ne pouvait cependant y aspirer autant que celui d’Hugues de Payns, à qui la papauté avait accordé dès 1139 le bénéfice intégral de ses prises de guerre ou spolia. Plusieurs actes de la pratique nous renseignent sur le statut social d’un avitailleur du Temple, en activité à Famagouste au début du XIVème siècle. Le Génois Pietro Alieri ou Alerio y apparaît comme témoin ou bénéficiaire d’opérations financières négociées avec des compatriotes. Le regain des activités maritimes de l’Ordre après la bataille de Homs suscita une vague d’embauches, que les templiers encadrèrent à l’aide d’un système de dépôt de cautions, censé limiter les risques de mutinerie. Les marins recrutés paraissent avoir été majoritairement provençaux et catalans, en raison de l’engagement préférentiel des Famagoustains «de souche» dans la marine royale. Une quittance de 1301 souligne la brièveté de ce type de contrats passés le temps d’un voyage ou d’une expédition, arrêtée en l’occurrence à huit semaines. Le dépositaire de la fidéjussion devait attendre la présentation d’une lettre de leur chef de mission ou capitaine pourpouvoir restituer aux marins la somme gagée, sous peine d’une amende double. Le service du Temple était devenu à cette époque une affaire aussi lucrative que complexe sur le plan juridique.

réf. : https://www.templiers.site/fr/node/57

La marine du Temple dans l’Orient des croisades

Pierre-Vincent CLAVERIE
Docteur de l’université de Paris I

Il peut sembler paradoxal de vouloir retracer l’histoire maritime d’un ordre dont la vocation était de protéger initialement les routes du royaume de Jérusalem des assauts des « voleurs et des maraudeurs ». Les templiers furent amenés cependant à arpenter dès les années 1120 les ports de Palestine, fréquentés par les pèlerins occidentaux, avant de se tourner vers ceux d’Europe, rapidement pourvus de commanderies. La perte des archives
centrales de l’ordre nous prive d’éléments de datation sûrs à l’égard de ces installations portuaires, que de trop rares récits mentionnent. Une telle incurie ne peut être que partiellement comblée par les résultats des campagnes de fouilles entreprises en Orient depuis un siècle ou le témoignage de sources périphériques provenant de Catalogne et de Sicile. La confrontation de ces documents aux différents textes normatifs et récits historiques devrait, néanmoins, nous permettre d’apprécier le degré d’adaptation des templiers à la navigation méditerranéenne. Nous répondrons à la problématique posée, il y a une douzaine d’années par Marie Luise Favreau-Lilie, en portant notre attention sur les infrastructures élaborées par le Temple, avant d’étudier ses flottes de guerre et de commerce, pour autant que ces concepts puissent être pertinents au Moyen Âge1.
La répartition des infrastructures portuaires

La perte des archives centrales du Temple, enregistrée à Chypre au XVIe
 siècle, nous
cantonne à une reconstruction prudente des infrastructures portuaires aménagées par les
templiers en Terre sainte. Nous savons que l’ordre se dota dès le XIIe
 siècle d’une
vingtaine de commanderies côtières, si l’on inclut dans ce total Arsuz et le modeste îlot
de Rouad, qui ne sont documentés que pour le siècle suivant. Ces maisons suivent
étroitement le découpage épiscopal de la Terre sainte, en incluant quelques positions
originales comme Gaza et Ascalon, au sud du royaume de Jérusalem, ou Port-Bonnel et
Alexandrette en Arméno-Cilicie. Ces régions présentent le point commun d’avoir été
inféodées au titre de marches frontalières aux ordres militaires dans les années 1153-1156,
qui virent les musulmans menacer l’équilibre de la Syrie franque. Tous les sites
portuaires desservis par le Temple en Petite-Arménie sont loin d’être aussi bien connus
que celui de L’Ayas, où l’ordre disposait d’un débarcadère fréquenté par des marchands
génois. Il en est ainsi du site de Port-Bonnel, que l’on a rapproché des sites de Minet alFrandj, d’Arsuz et de Burunli, à quatre kilomètres plus au sud d’Arsuz. Un guide
maritime du milieu du XIIIe
 siècle confirme cette localisation en plaçant Port-Bonnel à midistance entre Alexandrette et la pointe du Ras al-Rhanzir, que moins d’une quarantaine
de kilomètres sépareraient. La principauté d’Antioche dont ces possessions relevaient
jusqu’en 1195 possédait d’autres ports fréquentés par les frères du Temple, comme Saint Siméon et Lattaquié, dotée d’une commanderie dès 1154. L’ordre y conserva jusqu’en
1287 une commanderie capable de communiquer avec le reste de la Syrie par la voie de

1. G. de Tyr, Chronique, p. 557 ; M.-L. Favreau-Lilie, « The Military Orders and the Escape of the Christian
Population from the Holy Land in 1291 », p. 208, n. 21.
Les Ordres militaires et la mer 48
mer ou des airs en raison de l’existence d’un pigeonnier géant, en relation avec la ville de
Tortose2
.
Les templiers disposaient depuis 1152 d’un important château dans cette cité, organisé
autour d’un donjon arasé consciencieusement par les Mamelouks après 1291. Des fouilles
récentes ont pu mettre en évidence l’originalité de cette tour normande de vingt mètres
de côté, assez puissante pour repousser les assauts de Saladin en 1188. Les deux saillants
épaulant en front de mer l’édifice comportaient des poternes destinées au ravitaillement
maritime de la place. Il est probable que l’ordre disposait d’un débarcadère sur le flanc
méridional du donjon, où un semblant de quai a pu être dégagé. Cette situation était
partagée par la maison du Temple de Tripoli, dont la garnison facilita en 1282 un coup de
main de Guy II de Gibelet contre la capitale comtale. La commanderie possédait comme
celle d’Acre de vastes terrasses susceptibles d’accueillir les cargaisons imprégnées d’eau
de mer, que l’on faisait sécher au soleil3
.
Cette anecdote révèle la richesse de la documentation disponible pour le royaume de
Jérusalem, qui s’étendait du Nahr al-Kalb aux sables du Sinaï sur la frontière égyptienne.
Son havre le plus septentrional était le port de Beyrouth, où fut détournée dans la
seconde moitié du XIIe
 siècle la succession d’un chapelain du Temple, décédé entre Tripoli
et Acre. Ce cas de jurisprudence témoigne de la supériorité de la via maris sur un
itinéraire terrestre soumis à la pression grandissante des Ayyoubides4
. Le Temple
possédait, à quelques encablures de là, un manoir de belle taille à Sidon, avant d’acquérir
en 1260 le château de Mer édifié en 1227-1228 par des pèlerins anglais. Sidon présente fort
peu de vestiges de son occupation par le Temple en raison de l’arasement de ses huit
cents mètres de remparts relevés par l’ordre avant 1283. Le Temple n’apporta que peu de
modifications à l’enceinte extérieure du château de Mer, appareillée depuis le séjour de
saint Louis en bossages lisses de cinq mètres d’épaisseur, parsemés de colonnes en
boutisse. L’archéologue H. Kalayan a soutenu un point de vue contraire en 1973, en
attribuant à l’ordre la quatrième phase de construction de cette forteresse maritime,
cantonnée de quatre tours d’angle. C’est faire peu de cas de l’empreinte capétienne
laissée à l’édifice à travers le percement d’archères à étrier rectangulaire, différentes de
celles de Château-Pèlerin5
.
Le seul port en eau profonde de la région était celui de Tyr, qui nécessitait dans son
approche des pilotes expérimentés à cause de la dangerosité de ses récifs. Un isthme
barré par une triple muraille faisait de la ville une citadelle, dont le port était défendu
comme à Acre par une chaîne tendue entre deux tours. Cette situation exceptionnelle
explique la résistance opiniâtre de la ville en 1187 aux assauts de Saladin sous la direction
du marquis de Montferrat et du commandeur du Temple, Geoffray Morin, dont les
troupes parvinrent à s’emparer, le 30 décembre, de onze galères ennemies. Les templiers
disposèrent jusqu’en 1185 d’un quartier entier au sein de la cité que Raymond III de
Tripoli céda à la commune de Pise dans des circonstances mal élucidées. Ce pâté de
maisons enjambant la muraille de la cité comprenait une tour ainsi qu’une place courant
jusqu’à la mer. La rue ainsi que la commanderie du Temple demeurèrent au siècle
suivant un élément topographique important de la cité au même titre que certains
entrepôts6
. Le port de Tyr semble avoir été l’un des rares sites à être réoccupé au début

2. L. Minervini, Cronaca del Templare di Tiro (1243-1314), § 129 (365), p. 124 et p. 366, n. 2 ; P. Deschamps,
Les Châteaux des croisés en Terre sainte, t. III, p. 70 et 363.
3. K. Pospieszny, « Tortosa (Syrien) und Lucera (Apulien), die idealen Residenz-Kastelle der Kreuzzügezeit.
Eine Untersuchung nach militärischen Aspekten » ; H. de Curzon, La règle du Temple publiée pour la Société de
l’histoire de France, § 119, p. 99, § 143, p. 113 et § 609-610, p. 314-315.
4. H. de Curzon, ibid., § 563, p. 294-295 ; J. M. Upton-Ward, The Catalan Rule of the Templars. A critical edition and
English translation from Barcelona, Archivo de la Corona de Aragón, Cartas Reales, MS 3344, § 161, p. 68.
5. H. Kennedy, Crusader Castles, p. 121-124 ; A. J. Boas, Crusader Archaeology, p. 51 et 103-104 ; H. Kalayan,
« The Sea Castle at Sidon ».
6. G. de Tyr, op. cit., p. 572-573 ; Ibn Jobaïr, Voyages, t. III, p. 357 ; R. Röhricht, Regesta regni Hierosolymitani
(désormais appelés RRH), p. 178-179, no
 665, p. 177, no
 1184, p. 311-313 et no
 1331, p. 347-348.
49 La marine du Temple dans l’Orient des croisades
du XIVe
 siècle par les Latins à la suite d’une percée des Mongols en Syrie. Une déposition
du procès de Chypre mentionne en effet la réception sur place, le 28 mai 1300, du sergent
Jean de Saint-Georges devant plusieurs dignitaires. Cette tête de pont attestée par
plusieurs contrats de change génois ne dut pas survivre à la campagne menée sur le
littoral au mois de juillet par l’émir Djamâl ad-Dîn al-Afram. La suprématie navale des
Latins compromit néanmoins la réoccupation du site par les Mamelouks pour plusieurs
dizaines d’années d’après le témoignage de Ludolphe de Suchen7
.
Acre, capitale par procuration du royaume de Jérusalem, reste de loin le port le mieux
connu de Syrie du fait des fouilles entreprises par le gouvernement israélien depuis une
quarantaine d’années. La maison du Temple occupait jusqu’au 28 mai 1291 l’angle sudouest de la cité au contact du quartier de Pise, avec lequel elle communiquait par une
porte fortifiée dont deux niveaux ont été exhumés. Ce complexe comportait selon les
cartes de Pietro Vesconte (1320) et Paolino Veneto (1323) quatre tours d’angle, centrées
autour d’un donjon qui pourrait avoir comporté une coupole selon des esquisses
anciennes de Matthieu Paris. La tour maîtresse du Temple se dressait en effet depuis le
XIIe
 siècle le long du rivage, à l’opposé du palais magistral, dont la situation à la jonction
des quartiers pisan et génois fut source d’inquiétude durant la guerre de Saint-Sabas de
1256-1258. La destruction méticuleuse de l’endroit au XVIIIe
 siècle autorise une
reconstruction prudente des éléments aujourd’hui immergés par cinquante centimètres
de fond8
.
Une découverte retentissante a révélé en 1994 l’existence d’un tunnel templier de trois
cent cinquante mètres de long, reliant le fondouk pisan du khan a-una actuel aux
magasins du Temple. Ce passage comportait deux subdivisions débouchant sur le port,
d’où des officiers du Temple rapatriaient les marchandises exemptes de droit de douane.
Les templiers devaient entretenir, en outre, des représentants aux portes de la cité ou
dans le khan de la Fonde, voisin de la porte Saint-Nicolas, où l’on taxait en 1242 d’un
besant les esclaves et chevaux entrant. Un article de la règle du Temple mentionne en
effet l’existence de préposés auprès des cours de la Fonde et de la Chaîne, parés d’une
titulature spécifique. La partie occidentale de leur tunnel était soumise dans cette optique
au contrôle d’une salle de garde aménagée dans un vaisseau gothique, entrepris, semblet-il, après le blocus de la maison du Temple ordonné par l’empereur Frédéric II en 12299
.
La marine de guerre templière
L’histoire de la marine de guerre templière ne peut guère être esquissée avant la
Ve
 croisade, qui vit le delta du Nil servir de bases d’opérations à une multitude
d’escadres. La marine franque ne paraît en effet jamais avoir dépassé un stade
embryonnaire au XIIe
 siècle, ce qui contraignit les rois de Jérusalem à rechercher
constamment des alliances extérieures. La seule charte imposant l’affrètement d’une
galère tripolitaine à titre féodal a, de plus, de forte chance d’être apocryphe à en juger par
sa facture moderne. La situation se modifia considérablement après l’arrivée à Saint-Jeand’Acre en 1217 d’une escadre frisonne, conduite par l’écolâtre Olivier de Cologne. Un
certain nombre des koggen la composant furent confiées aux ordres militaires au moment
de l’invasion du Delta en 1218. Quatre koggen et deux nefs équipées par l’Hôpital et le
Temple parvinrent, le 24 août 1218, à s’emparer d’une tour défendant l’accès de Damiette

7. K. Schottmüller, Der Untergang des Templer-Ordens, t. II, p. 205 ; R. Röhricht, RRH, p. 366-367, no
 1413 ; M. Ibn
Abil-Faza’il, « Histoire des sultans mamelouks », p. 23-24 [529-530] ; L. de Suchen, Liber de itinere Terræ Sanctæ,
p. 39.
8. D. Jacoby, « Les communes italiennes et les ordres militaires à Acre : aspects juridiques, territoriaux et
militaires (1104-1187, 1191-1291) ».
9. A. J. Boas, op. cit., p. 36-37 ; J. Richard, « Colonies marchandes privilégiées et marché seigneurial. La fonde
d’Acre et ses “droitures” » ; H. de Curzon, op. cit., § 616-617, p. 317-319.
Les Ordres militaires et la mer 50
à l’issue de combats acharnés. Cette victoire frappa tellement les esprits qu’une chronique
italienne l’attribue à l’intervention d’une milice céleste, plus que terrestre, en invoquant le
témoignage des défenseurs musulmans éberlués. Le siège de la ville rebondit en
novembre 1218 avec le sacrifice d’une kogge templière, précipitée contre les murailles de
Damiette10.
La totalité des sources souligne le sabordage du navire décrété par les templiers après son
abordage par une centaine de fedayins, que l’Estoire d’Eracles porte à plus de deux
milliers ! Le naufrage du navire entraîna, quoi qu’il en soit, dans les profondeurs du
fleuve plus de combattants que les glaives des templiers n’auraient pu en tuer selon le
témoignage des chroniqueurs latins, pétris de références bibliques. Un récit moins
favorable signale qu’un groupe de templiers serait parvenu à traverser le fleuve « avec
l’aide du Seigneur », à bord d’une barque et d’une galère arrachées aux Sarrasins, en
convainquant le sultan de couler sa flotte et de fortifier la rive par toutes sortes de lices et
de mangonneaux11. Le Temple assurait pourtant à cette date un rôle primordial dans le
déroulement des opérations, après avoir édifié un pont de bateaux entre la tour,
récemment conquise, et la rive ouest du fleuve. Sa polyvalence lui permettait de
reconvertir certains de ses équipages privés de navire en servants d’artillerie, comme cela
advint au mois d’avril 1219. La pierrière, qui bénéficia de ce surcroît de main-d’œuvre, fit
preuve de tant de précision que les assiégés lui conférèrent le surnom évocateur de
culbuteur ou al-mûfrita12.
La progression de l’ost de la croisade se heurta en août 1219 à un cruel manque de vent,
qui empêchait les galères chrétiennes de ravitailler convenablement l’armée. Le Temple
eut l’intelligence de recourir à des navires d’un plus faible tirant d’eau afin de s’adapter à
la navigation estivale dans le Delta. La capture d’une de ses galiotes chargée de cinquante
balistes, en août 1221, préfigura l’humiliante capitulation de Barâmûn, imposée par la
tournure des événements. Les exploits navals des templiers, qui panachaient leurs
équipages de croisés occidentaux, ne manquèrent pas de générer une abondante
littérature dominée par la figure d’un énigmatique Liber Templariorum13. Il fallut
cependant attendre la VIIe
 croisade pour que le Temple se dotât d’un vaisseau amiral,
que Jean de Joinville visita au moment du paiement de la rançon de saint Louis en mai
1250. Cette mestre galie présentait les traits d’une banque flottante, abritant dans sa cale
les dépôts réguliers des participants de la croisade. Ce navire devait ressembler à
l’impressionnante galère de Jean de Jaffa, qui avait frappé les esprits des croisés, un peu
plus tôt, par la peinture intégrale de sa coque et le renforcement de ses flancs à l’aide de
trois cents targes. Celles du Temple devaient arborer le gonfanon baussant de l’ordre et
employer un nombre incalculable de prisonniers de guerre. Peut-être comportaient-elles
un pont blindé et ignifugé comme certains navires de transport de troupes14 ?
Nous savons grâce à la chronique dite du « Templier de Tyr » que le grand maître
Guillaume de Beaujeu n’hésita pas à armer, en 1279, treize de ces galées afin de porter la
guerre dans le comté de Tripoli à l’occasion d’une crise féodale. Le corps expéditionnaire
qu’il transborda se risqua à gravir les contreforts du Liban pour défaire l’armée comtale à
plus de mille mètres d’altitude dans le casal d’ad-Dumâ. La flotte templière opéra par la

10. Paris, Bibliothèque nationale, Manuscrits, NAL 2226, no
 1 ; C. Huygens et R. Burchard (éd.), Lettres de Jacques
de Vitry, no
 V, p. 112-122 ; J.-F. Michaud, Bibliothèque des croisades, t. II, p. 591 (Gesta obsidionis Damiatæ).
11. R. Röhricht, Quinti Belli Sacri scriptores minores, p. 145, 72 et 80-81 ; H. Hoogeweg, Die Schriften des kölner
Domscholasters, späteren Bischofs von Paderborn und Kardinal-bischofs von S. Sabina, Oliverus, p. 194-195 ; Estoire
d’Eracles, p. 337-338.
12. R. Röhricht, Quinti Belli Sacri, op. cit., p. 46, 172-173 et 177-178 ; H. Hoogeweg, op. cit., p. 205 ;
R. Röhricht, Testimonia minora de Quinto Bello Sacro e chronicis occidentalibus, p. 295 ; L. de Mas Latrie, Chronique
d’Ernoul et de Bernard le trésorier, p. 418-419 ; Estoire d’Eracles, op. cit., p. 346.
13. R. Röhricht, RRH, p. 251, no
 946 ; H. Hoogeweg, op. cit., p. 271-273 ; H. de Curzon, op. cit., § 149-150, p. 116-
117, § 368, p. 207 et § 616, p. 317-318 ; J. M. Upton-Ward, op. cit., § 189, p. 20 ; J.-F. Michaud, op. cit., t. II, p. 591,
595-596 et 603.
14. J. de Joinville, Vie de saint Louis, § 383-385, p. 188, § 158-159, p. 77 et p. 79 ; E. Blochet, « Histoire d’Égypte de
Makrizi », p. 207.
51 La marine du Temple dans l’Orient des croisades
suite une démonstration de force devant Tripoli avant de perdre cinq navires dans une
tempête inopinée. Les équipages des galères reçurent l’aide inespérée de leur allié Guy de
Gibelet, qui était venu mettre le siège devant le château de Néphin (act. Enfé) avec un
contingent templier. L’échec de cette entreprise amena Guillaume de Beaujeu à regagner
incontinent Acre, tandis que Bohémond VII d’Antioche razziait l’île d’al-Hlaliyé, au large
de Sidon, avec le soutien d’une quinzaine de galères. Il est peu probable que ces navires
aient réussi à prendre le contrôle du château de Mer, situé plus au sud, qui ne fut
abandonné par les templiers que le 14 juillet 1291 sous la pression des Mamelouks. La
flotte templière prit soin à cette occasion d’évacuer la population de la ville, réfugiée sur
l’îlot d’al-Hlaliyé. Ces péripéties mettent en évidence l’extrême mobilité du Temple, au
même titre que l’instabilité politique de la Syrie franque à la veille de sa chute15.
Les rivalités vénéto-génoises compromirent dans les dernières années du siècle la
réaction de la chrétienté en générant, en 1293, un engagement naval au large du
Péloponnèse, qui coûta la vie au turcoplier Guillaume de La Tour. L’initiative revint au
pape Nicolas IV d’affréter en 1292 une flotte de vingt galères, vouée à défendre l’île de
Chypre et le royaume de Petite-Arménie contre une éventuelle attaque mamelouke. Les
Annales génoises de Jacopo Doria révèlent que cette flotte ne partit qu’après le décès du
souverain pontife à la suite d’une insubordination de Manuele Zaccaria et de Tedisio
Doria, sanctionnée sévèrement par la République. Le Sacré Collège, qui gérait les affaires
de la chrétienté par intérim, intervint pour que les deux amiraux fussent autorisés à
armer une dizaine de navires destinés à appuyer le Temple et l’Hôpital. Le Grand Conseil
consentit à les autoriser à s’engager en Orient pendant une année au « service de
l’Église », après avoir levé l’amende qui les accablait16. Le Temple choisit cette époque
pour se doter d’un arsenal inféodé à un « amiral ou capitaine » temporaire, dans lequel
nous pensons distinguer un chef d’escadre (preceptor navium) occasionnel, plutôt qu’un
simple patron de nef comme Alain Demurger le suggère. Nicholas Coureas est allé,
semble-t-il, trop loin en accordant à cet office un caractère durable sur le modèle de celui
de l’Hôpital, attesté à compter de 1299. L’amiral du Temple devait cependant, à l’instar
de son homologue, solliciter l’armement de sa flotte auprès du maréchal du couvent et
reverser ses prises de guerre au trésor de l’ordre17.
La marine templière souffrit, la même année, d’une convention signée entre la Couronne
chypriote et le clergé de l’île au sujet du prélèvement d’une contribution de guerre. Le
Temple et l’Hôpital renoncèrent à extrader sur leurs navires des serfs appartenant au roi
en ouvrant leurs cales à ses inspecteurs. L’affrètement de leurs bâtiments fit l’objet de
plusieurs articles, révélant la concurrence représentée par les deux ordres pour les
arsenaux royaux. La liberté de manœuvre reconnue aux ordres se heurta à la volonté du
roi de concéder des licences d’armement, distribuées au compte-gouttes avant un
revirement spectaculaire en 1307. Boniface VIII avait pourtant fait la moitié du chemin en
reconnaissant au roi un droit d’embauche prioritaire sur les ressortissants de son
royaume, respecté par les templiers. Le pape, après avoir condamné le principe d’une
concurrence occulte des ordres, déclara en cas de prise commune comme « juste et
équitable » un partage du butin effectué au pro rata du nombre de navires et de
participants impliqués. Ce partage devait se subordonner à une échelle de valeur
favorable, légitimement, aux combattants. L’immunité des ordres militaires se trouva
diminuée par l’obligation d’ouvrir leurs navires à des inspections réglementaires à
chaque accostage ou départ, motivées par la recherche d’éléments d’accastillage

15. L. Minervini, op. cit., § 163-164 (399-400), p. 150, § 273-274 (509-510), p. 226, et p. 228 ; A. al-Maqrizi, Histoire
des sultans mamelouks de l’Égypte, t. II (A), p. 127.
16. J. Doria, « Annales Januenses », dans Annali Genovesi, t. V, p. 143-144 ; L. Minervini, op. cit., § 288-290 (524-
526), p. 234.
17. A. Demurger, Jacques de Molay. Le crépuscule des templiers, p. 178 ; N. Coureas, « The role of the Templars and
the Hospitallers in the movement of commodities involving Cyprus, 1291-1312 », p. 258-259.
Les Ordres militaires et la mer 52
fréquemment volés. Tout capitaine se dérobant à ce rituel devait faire l’objet de
poursuites officielles en cas de disponibilité des baillis royaux18.
Le Temple s’investit dans les années qui suivirent dans l’interception des navires tentant
de commercer avec les « infidèles » contre la volonté du Saint-Siège. Le commandeur
d’Auvergne Humbert Blanc parvint à convaincre Clément V, le 13 juin 1306, de confier le
commandement d’un groupe de galères à l’amiral marseillais Pierre de Lengres, qui reçut
des lettres de grâce susceptibles d’être produites dans les ports où il ferait relâche. Il
paraît assez ardu d’estimer la taille de l’escadre dirigée par les deux hommes, même si
des rumeurs véhiculées durant le procès du Temple font état d’une vingtaine de
bâtiments. Pierre de Lengres reçut en tout cas « le droit de choisir un prêtre adéquat
comme confesseur », afin d’absoudre les membres de leur compagnie en indélicatesse
avec l’Église. Ce privilège insigne fut réservé à ceux qui s’engageraient à partir en Orient
sous un mois, en amendant leurs torts sincèrement. Ces Alexandrini repentis bénéficièrent
du privilège appréciable de pouvoir conserver intégralement le produit de leur course,
quelle que soit la nationalité des navires interceptés19.
Le lyrisme de cette bulle ne permet de cerner qu’indirectement la situation juridique des
captifs pris en mer par la marine pontificale. Les Assises de la cour des Bourgeois
réservaient dans les royaumes de Jérusalem et de Chypre un sort expéditif aux
trafiquants de produits stratégiques, dont les pécules de plus d’un marc d’argent
revenaient au seigneur du lieu. Il est probable qu’Humbert Blanc souhaitait respecter
cette procédure pour les contrevenants arraisonnés dans les parages de l’île de Chypre,
sans attendre des miracles de la justice royale, soumise aux pressions des républiques
italiennes. Cette réorientation des activités du Temple vers la course aurait dû déboucher,
dans la pratique, sur l’institutionnalisation de la charge d’amiral, opérée par l’Hôpital en
1300. Cette innovation annonçant le temps des ligues égéennes fut, peut-être, rejetée par
le Temple, dont le conservatisme s’accommodait mal de la vénalité de certains de ses
aspects. Aucun autre ordre ne pouvait cependant y aspirer autant que celui d’Hugues de
Payns, à qui la papauté avait accordé dès 1139 le bénéfice intégral de ses prises de guerre
ou spolia20.
Plusieurs actes de la pratique nous renseignent sur le statut social d’un avitailleur du
Temple, en activité à Famagouste au début du XIVe
 siècle. Le Génois Pietro Alieri ou
Alerio y apparaît comme témoin ou bénéficiaire d’opérations financières négociées avec
des compatriotes. Le regain des activités maritimes de l’ordre après la bataille de Homs
suscita une vague d’embauches, que les templiers encadrèrent à l’aide d’un système de
dépôt de cautions, censé limiter les risques de mutinerie. Les marins recrutés paraissent
avoir été majoritairement provençaux et catalans, en raison de l’engagement préférentiel
des Famagoustains « de souche » dans la marine royale. Une quittance de 1301 souligne
la brièveté de ce type de contrats passés le temps d’un voyage ou d’une expédition,
arrêtée en l’occurrence à huit semaines. Le dépositaire de la fidéjussion devait attendre la
présentation d’une lettre de leur chef de mission ou capitaine pour pouvoir restituer aux
marins la somme gagée, sous peine d’une amende double. Le service du Temple était
devenu à cette époque une affaire aussi lucrative que complexe sur le plan juridique21.

18. Rome, Archivio Segreto Vaticano, Reg. 49, ann. V, chap. 234, fol. 186 ro
-187 ro
 ; N. Coureas, The Latin Church
in Cyprus, 1195-1312, p. 167 ; H. Finke, Acta Aragonensia, t. III, p. 146-147, no
 66 ; V. Polonio, Notai genovesi in
Oltremare : Atti rogati a Cipro da Lamberto di Sambuceto (3 Luglio 1300 - 3 Agosto 1301), no
 413, p. 493-494.
19. A. Tosti et al., Regestum Clementis papæ V (1305-1314), t. I, p. 190-192, no
 1034-1036 ; H. Finke, Papsttum und
Untergang des Templerordens, p. 339.
20. J.-F. Michaud, op. cit., t. III, p. 381 ; A. Luttrell, The Hospitallers State on Rhodes and its Western Provinces, 1306-
1462, no
 VIII, p. 178-179.
21. C. Desimoni, « Actes passés à Famagouste de 1299 à 1301 par-devant le notaire génois Lamberto di
Sambuceto », t. II (B), no
 LXXVI-LXXVIII, p. 44-45 et t. I, no
 CCCVI, p. 106-107 ; V. Polonio, op. cit., p. 493-494.
53 La marine du Temple dans l’Orient des croisades
L’organisation du subsidium Terre Sancte
L’absence remarquée du Temple des contrats de fret génois et marseillais témoigne de
l’existence d’une véritable flotte de commerce templière dès les premières années du
XIIIe
 siècle. Malgré leur présence précoce en Biscaye et dans la Manche, les templiers
concentrent à cette époque la majeure partie de leurs activités autour des principaux
ports provençaux, comme plusieurs études l’ont mis en exergue. Marseille présente
l’intérêt de se situer à proximité du couloir rhodanien, où officie le « commandeur du
Passage », chargé d’écouler en Orient les ressources humaines et matérielles de l’ordre22.
Les compétences des différents détenteurs de cette charge semblent avoir permis le
transfert de plusieurs centaines de combattants en Orient au vu des trois cents frères
acheminés à Chypre en 1297, en temps de paix. Les relations nouées par le Temple avec
les municipalités provençales connurent au cours du XIIIe
 siècle différentes péripéties,
dont témoigne un sérieux différend survenu avec les autorités marseillaises en 123323.
Une série de confiscations perpétrées dans la cité phocéenne conduisit les maîtres du
Temple et de l’Hôpital à demander réparation, cette année-là, au connétable du royaume
de Jérusalem, Eudes de Montbéliard, dont ils attendaient une saisie compensatoire. Un
terrain d’entente finit par être trouvé, le 3 octobre, en accordant aux deux congrégations
le droit de décharger librement dans le Vieux-Port quatre naves par an. Si aucun frein ne
fut mis au nombre de marchands embarqués sur lesdits navires, un quota de mille cinq
cents pèlerins fut imposé aux deux ordres qui menaçaient l’équilibre du marché
marseillais. Ce chiffre pourrait surprendre pour ceux qui ignorent l’existence de navires
de plus d’un millier de passagers dès le XIIe
 siècle en Méditerranée. Les chartes de la
famille Manduel révèlent la modestie des échanges réalisés par les templiers, en temps de
paix, en ne mentionnant que trois de leurs nefs à l’occasion des « passages » de 1229, 1235
et 1240. Les marchands phocéens embarqués à bord de ces navires paraissent avoir été de
modestes commis spéculant sur le taux de change avantageux des royaux coronats à
Saint-Jean-d’Acre, ou sur le commerce du corail importé d’Afrique du Nord. Le dernier
de ces contrats laisse entendre une rotation saisonnière des naves templières, dont le
retour était prévu pour la mi-août suivante, à en croire une lettre de l’évêque Florent
d’Acre de 126124.
Les commandeurs de naves templières avaient acquis au milieu du siècle suffisamment
d’expérience pour que saint Louis confiât sa vie à l’un d’entre eux lors de son retour de
Terre sainte. Joinville nous a laissé une description vivante du frère Raymond, qui
présida au naufrage de la nef royale, en avril 1254, sur un banc de sable chypriote. Frère
Raymond déchira à cette occasion ses vêtements jusqu’à la ceinture en arrachant sa barbe
de dépit. À sa peur de mourir noyé s’ajouta probablement un profond sentiment de
culpabilité, lié à son impassibilité devant une aveuglante brume de terre. Une telle faute
aurait pu lui valoir un passage en « cour martiale », assorti d’une levée d’habit selon les
prescriptions de la règle. Le destin en décida autrement en désengageant la nef à la
stupéfaction de Louis IX. La marine templière produisit quelques figures emblématiques,
comme le commandeur Vassal, qui officiait à Marseille dans les années 1270, ou son
émule Roger de Flor, qui vit le jour à Brindisi où l’ordre faisait radouber ses nefs. Le

22. A. Demurger, Vie et mort de l’ordre du Temple, p. 216-217 ; D. Carraz, L’ordre du Temple dans la basse vallée du
Rhône (1124-1312), p. 241-246 et 493-506.
23. H. Finke, Papsttum, op. cit., t. II, p. 335 ; E. Winkelmann, Acta imperii inedita, t. I, p. 117-118, no
 139 ;
R. Röhricht, RRH, op. cit., no
 1046, p. 273-274.
24. R. Röhricht, Id. ; P. Chaplais, Documents preserved in the Public Record Office, no
 343, p. 241-242 ; Ibn Jobaïr,
op. cit., t. III, p. 364 ; L. Blancard, Documents inédits sur le commerce de Marseille au Moyen Âge, t. I, p. 28-29, no
 22,
p. 102-103, no
 68 et p. 134-135, no
 87.
Les Ordres militaires et la mer 54
Temple était alors en train de réorienter ses bases arrière en négligeant étrangement le
port de Messine comme Kristjan Toomaspoeg l’a mis récemment en évidence25.
Le destin exceptionnel de Roger de Flor débuta avec l’achat en 1282 par le Temple du
« plus grand navire qui fût fait en ce temps-là » dans le port de Gênes. Roger reçut le
commandement du bâtiment, qui s’imposa jusqu’en 1291 comme la plus grande nef
acconitaine de l’ordre. Sa carrière dérapa en mai 1291 lorsqu’il évacua vers ChâteauPèlerin les citoyens les plus estimés d’Acre à prix d’or26. Roger remit à Jacques de Molay
son butin avant de faire l’objet d’un mandat d’amener en bonne et due forme après la
tenue d’un chapitre disciplinaire. Des fuites lui permirent de contrecarrer ces projets en
se réfugiant à Marseille, où il dégréa son navire avant de gagner Gênes avec le produit de
cette vente frauduleuse. Ce volte-face compromit son arrestation à Marseille, d’où La Rose
du Temple continuait d’acheminer jusqu’en Orient à la fin du XIIIe
 siècle d’humbles
commis comme Raymond Massone ou Jacques Avignon27.
La Couronne angevine concédait à cette époque au Temple des licences d’exportation de
pondéreux à l’initiative de la papauté, qui avait commencé par solliciter l’exonération de
naves brindisiennes au milieu du siècle. Ces privilèges permettaient au Temple
d’économiser l’équivalent de deux cent quatre-vingts à quatre cent vingt besants
sarracénats de frais de douane pour un peu plus d’une vingtaine de tonnes de blé et une
trentaine d’orge, ce qui, les années fastes, pouvait représenter un pactole de dix mille cinq
cents à quinze mille sept cent cinquante besants, comme en 1295 dans un contexte de
sévère pénurie. L’approvisionnement de la Terre sainte pouvait également être le fait de
marchands péninsulaires, astreints à présenter à leur retour des certificats de livraison ou
littere responsales, scellés par les chancelleries du Temple et de l’Hôpital, voire par le
patriarche de Jérusalem en personne. Ce collège instauré par Grégoire X fut élargi à partir
de 1277 au bayle officiel du roi de Sicile en Orient, Ruggero Sanseverino, à qui succéda en
1282 le Français Eudes Poilechien28.
Les registres napolitains de Charles Ier d’Anjou ne mentionnent que deux navires
templiers affrétés durant la huitième croisade, l’Allégresse ainsi que la Nave Angélique. À
ce navire exonéré en novembre 1270 vint s’ajouter une nave anonyme en janvier 1271,
relayée par une escadre indéterminée, trois ans plus tard. Le bénéficiaire de ces largesses
fut le chapelain Arnoul de Wezemaal, qui, après un premier envoi de « victuailles »,
parvint à exporter en 1274 deux mille saumes de céréales, à raison de deux cent onze
tonnes de froment et de cent soixante-cinq d’orge. Peut-être recourut-il au service de la
Sainte-Marie, en activité en 1278, sans que l’on puisse présager de sa date de mise en
service ? Cette abondance de noms tranche avec le seul navire teutonique mentionné
dans les Pouilles en 1267 par les archives angevines. Le Temple ne semble pourtant pas
avoir cantonné ses activités dans la botte italienne, où il n’obtint en une vingtaine
d’années que sept licences d’exportation contre dix-sept pour l’Hôpital29.
Il possédait en effet depuis les années 1240 un port sur le littoral dalmate en relation avec
ceux de Zablace et de Zadar, qui exportait malheureusement moins de grain qu’il n’en
importait… La Couronne d’Aragon offrait à travers son riche patrimoine des potentialités
plus variées, dont l’ordre profitait largement en échappant comme le Saint-Sépulcre aux
prélèvements du clergé séculier. Un privilège d’Alphonse III accordé au commandeur
provincial, Berenguer de Santjust, le 14 avril 1290, révèle l’ampleur de ces transferts
avoisinant les dix-huit tonnes de froment pour une demi-douzaine d’orge et d’avoine. La

25. J. de Joinville, op. cit., § 618-629, p. 306-313 ; K. Toomaspoeg, « Le patrimoine des grands ordres militaires en
Sicile, 1145-1492 », p. 317.
26. R. Muntaner, Crònica, t. II, p. 60-61.
27. L. Blancard, op. cit., t. II, p. 436, no
 49 et p. 446, no
 79.
28. J. H. Pryor, « In subsidium Terræ Sanctæ : Exports of Foodstuffs and War Materials from the Kingdom of Sicily
to the Kingdom of Jerusalem, 1265-1284 », p. 128-129 et 131 ; F. Schillman, Die Formularsammlung des Marinus von
Eboli, p. 263 no
 1958 ; L. de Mas Latrie, Histoire de l’île de Chypre sous le règne des princes de la maison de Lusignan, t. II,
p. 91-92 ; E. Fleuchaus, Die Briefsammlung des Berard von Neapel. Überlieferung - Regesten, p. 396-397, no
 284.
29. J. H. Pryor, ibid., p. 134-135 et 142 ; M.-L. Favreau-Lilie, op. cit., p. 206, n. 10.
55 La marine du Temple dans l’Orient des croisades
Catalogne, et en particulier la plaine ampourdane, permettaient de joindre à ces envois de
l’huile d’olive, des animaux de bât, des armes aux côtés de plusieurs dizaines de chevaux.
Un inventaire réalisé en 1289 à l’échelle de la province révèle la spécialisation de certaines
commanderies, qui assignent comme Cantavella « au seigneur maître et à la sainte terre
d’outre-mer neuf cent soixante cafissos de froment, dix carcasses de porc salées et trois
cents fromages », tandis qu’Ambel exporte cent cinquante metres de vin et cent cafissos de
seigle30.
Le poids des défaites contraignait l’ordre à importer un nombre croissant de destriers
arabes, moins onéreux que les turcomans de Terre sainte. Le Temple utilisait, pour ce
faire, de larges nefs, dotées de portes arrière ou latérales, qui finirent par leur donner le
surnom d’« huissiers ». Ces navires pouvaient accueillir jusqu’à une centaine de chevaux
dans des boxes de soixante-treize centimètres de large et deux mètres cinquante-neuf de
profondeur, aménagés au-dessous de la deuxième couverte. On les y suspendait par des
sangles afin d’assurer leur stabilité au cours du voyage et leur épargner au maximum le
mal de mer. De temps à autre, on les fouettait pour leur dégourdir les jambes. Il semble
que ces conditions de transport aient permis des convoyages convenables, malgré des
ravitaillements en fourrage nécessaires à Messine. La quantité d’eau embarquée pour
chaque cheval avoisinait lors d’une traversée les neuf cents litres d’après un contrat
marseillais contemporain31.
Les derniers temps du royaume de Jérusalem virent les exportations se multiplier en
direction de la Terre sainte, dont la frange littorale souffrit de sécheresses répétées. Le
Temple s’occupa de venir en aide, après la chute d’Acre, aux cent mille réfugiés de Syrie,
qui reçurent au printemps 1295 près de neuf cent quatre-vingt-onze tonnes de fret32.
Charles le Boiteux avait participé à cet effort, dès le mois de février, en octroyant au
Temple une rente annuelle de mille saumes de froment à écouler parmi ses partisans
repliés à Chypre. Ces prescriptions n’étaient pas pour déplaire au Temple, qui se plaisait
à choisir « ses pauvres » parmi l’aristocratie franque, sans utiliser toutefois de listes
nominatives comme l’administration angevine. Charles II accorda à l’ordre, contre le
respect de cette clause, le droit d’exporter librement pour les deux années à venir jusqu’à
huit mille saumes de Pouille, soit près de mille six cent quatre-vingt-quatorze tonnes, à
partir de ses États33.
Les commanderies catalanes privilégiaient à la même époque l’envoi de salaisons en
Orient dans la perspective de sièges prolongés, auxquelles s’ajoutaient des revenus en
numéraire pouvant atteindre mille marcs d’argent. Un marchand de Barcelone s’engagea,
en 1304, à transférer le montant de ces responsiones à Limassol, après avoir soldé sur place
la cargaison de son navire, moyennant des intérêts de 14,5 % redevables à son retour. Ces
revenus étaient le plus souvent associés, comme en 1307, à des expéditions de blé, vitales
pour le royaume de Chypre. Le système fonctionnait d’autant mieux que les comptes
étaient à la veille de la chute de l’ordre inspectés par le trésorier conventuel, Pere de
Castelló. Il ne fait guère de doute que la logistique templière aurait relevé les défis de la
modernité si la course de l’ordre n’avait pas été interrompue arbitrairement dans la
matinée du vendredi 13 octobre 130734.

30. M. Fernández de Navarrete, « Disertacion histórica sobre la parte que tuviéron los españoles en las guerras
de Ultramar ó de las cruzadas y como influyéron estas expediciones desde el siglo XI hasta el xv en la extension
del comercio marítimo y en los progresos del arte de navegar », no
 XVI, p. 174-175 ; J. M. Sans i Travé, « Armes,
queviures i bestiar d’algunes comandes del Temple a Catalunya, Aragó i València segons uns inventaris de 1289
(Primera part) », p. 80 et 74.
31. M. Mollat, « Problèmes navals de l’histoire des croisades », p. 352-353 ; J. H. Pryor, « Transportation of
Horses by Sea during the Era of the Crusades : Eighth Century to 1285 a.d. », p. 106.
32. L. de Mas Latrie, Histoire de l’île de Chypre, op. cit., t. II, p. 91-92. Nos calculs se fondent sur une estimation de
la saume générale de Sicile de 275 l et un poids spécifique du froment de 0,77 g/ml.
33. N. Housley, « Charles II of Naples and the Kingdom of Jerusalem », no
 1, p. 533-535 ; J. H. Pryor, « In
subsidium Terræ Sanctæ », op. cit., p. 129.
34. A. J. Forey, The Templars in the Corona de Aragon, p. 325 et no
 XLV, p. 415-419.
Les Ordres militaires et la mer 56
Résumé
Cette communication est l’émanation d’une thèse de doctorat sur le destin oriental du
Temple soutenue au mois de juin 2004 à l’université de Paris I. Sa problématique tourne
autour des rapports entretenus par les templiers avec la mer dans les colonies franques de
Syrie aux XIIe
 et XIIIe
 siècles. Aussi les sources envisagées associent-elles le témoignage de
minutiers italiens à celui de chroniques levantines et de comptes rendus de fouilles. La
localisation de nombreuses commanderies en bord de mer, comme à Lattaquié, Tripoli ou
Tyr, plaide en faveur d’une organisation ancienne de l’ordre selon un principe appliqué en
Occident dans la seconde moitié du XIIe
 siècle. Cela n’est toutefois qu’au XIIIe
 siècle que le
Temple se dote d’une flotte de guerre à l’occasion des Ve
 et VIe
 croisades, qui le voient
superviser des opérations logistiques dans le delta du Nil. L’ordre atteint sa pleine maturité
sous Guillaume de Beaujeu († 1291), en ravitaillant l’Orient latin à partir de la Sicile et de la
Catalogne tout en lançant des opérations combinées sur le littoral syrien. La question se
pose de savoir si le Temple se dota durant ces années d’une organisation comparable à celle
de l’Hôpital et si ses membres avaient le pied marin malgré leur inexpérience initiale.

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On ne sait rien ou presque de la flotte de l’Ordre du Temple

Tout au plus savons-nous que 17 navires ont quitté le port d’attache La Rochelle le 12 octobre 1307 pour une destination inconnue. Pourtant, l’on est en droit de se poser la question : était-elle importante ou au contraire, les Templiers se bornaient-ils à louer les bateaux dont ils avaient besoin ? D’autant plus qu’un renseignement nous apprend que la flotte de l’Ordre des Hospitaliers lui était de beaucoup plus importante puisqu’elle comptait 22 « Commandants de la Mer » ! Tandis que la flotte templière était sous les ordres du représentant de l’Ordre en Orient. Nous connaissons l’emplacement des ports maritimes : Pour la France : Picardie : Wissant, Berck sur Mer Normandie : Le Tréport, Saint Valéry en Caux, Bénerville sur Mer, Lion sur Mer, Langrune sur Mer, Barfleur. Bretagne : Vildé la marine, Saint Cast le Guildo, Perros-Guirrec, Loctudy, Île aux Moines. Charentes : La Rochelle. Roussillon-Catalogne : Le Barcarès, Collioure. Languedoc : Marseillan. Provence : Fos sur Mer, Martigues, Marseille, Toulon, Hyères, Saint Tropez, Saint Raphael, Antibes, Villefranche sur Mer, Beaulieu, Monaco, Menton. Pour l’Italie : Gênes, Pise, Venise, Brindisi (pour l’hivernage). Pour le Moyen-Orient : Saint Jean d’Âcre, Tyr, Jaffa, Beyrouth, Ascalon, etc. Maintenant que ce rappel est fait, voyons le type de navires utilisés. La guerre fait rage en Orient, il faut donc des navires de guerre pour protéger les routes maritimes. Les GALERES. Inspirées de l’Antiquité, elles mesurent 40 mètres de long sur 6 de large mais n’embarquaient que 25 hommes d’armes. Leur nombre n’est pas connu. Nous apprenons simplement que lors d’une bataille navale, 10 galères furent déployées tandis que lors d’une attaque de citadelle, l’une des deux galères utilisées avait été coulée par les Sarrasins. Les BARBOTES à faible tirant d’eau étaient utilisées justement pour les attaques de murs d’enceinte et de ce fait avaient les pavois renforcés de plaques de fer. Venaient ensuite, les SAETIS que nous pouvons comparer toute proportion gardée à des avisos ou vedettes rapides. Ils servaient également à transmettre les ordres. Les GAMELS (de camel, chameau) ou GANGUEMELS quant à eux étaient des escorteurs. Pour ce qui est des troupes transportées : Les NEFS et BUZE-NEFS. Navires de 35 mètres de long sur 14 de large. Elles pouvaient transporter jusqu’à 500 hommes. Quoique, pour la conquête de Constantinople, on sait que 5 d’entre elles transporteront 7000 combattants soit 1400 par navire ! Mais on ne connaît pas leurs dimensions. Ces navires sont utilisés pour le commerce évidemment … Les SALANDRES, autres navires non-armés, mais avec un équipage de 30 hommes font également partie de la flotte. Maintenant, un navire très particulier apparaît. Il s’agit de la NEFHUISSIERE ainsi appelée car la partie de côté s’ouvrait formant un huis (une porte) qui s’appuyait sur le quai. On pouvait y embarquer jusqu’à 100 chevaux. Une fois en cale, les animaux étaient sanglés de telle façon que leurs déplacements ne pouvaient affecter la flottabilité du navire. Comme signalé plus haut, La Rochelle était le port principal de la flotte. Ce port permettait le commerce vers le nord et bien sûr en Méditerranée. Autre port principal mais celui-là d’embarquement : Marseille. L’on a retrouvé dans les archives de la ville l’autorisation donnée aux Templiers de « faire construire et réparer des navires ». Pourquoi aurait-on donné cette autorisation si l’Ordre n’avait pas les moyens, techniques et financiers, de s’en servir ? On a découvert, par la même occasion, que les armateurs locaux et étrangers : Pisans, Vénitiens, Gênois avaient intenté plusieurs procès (qu’ils ont perdu d’ailleurs) contre les Chevaliers pour concurrence déloyale. En effet, les tarifs pratiqués par l’Ordre étaient inférieurs aux concurrents. De toute façon, il n’était par rare que les passagers en cours de traversée étaient vendus comme esclaves aux pirates barbaresques qui infestaient la Méditerranée, ce qui n’était pas le cas pour les bateaux templiers. De plus, l’Ordre avait mis en place un système de navettes hebdomadaires pour l’Orient. Sachant qu’une traversée pouvait prendre huit jours, il fallait donc au moins deux navires dans chaque port pour assurer un tel roulement. Si je continue mon raisonnement : l’Ordre possédait près de 40 ports donc une flotte marchande de 80 navires est une hypothèse qui se tient. Ce bref exposé ne serait pas complet si je n’attirais pas votre attention sur quelques faits et anecdotes relatifs aux Templiers. Alors que l’Histoire tient comme certaine l’année 1118 comme date de création de l’Ordre du Temple, on peut lire dans des chroniques scandinaves : En 1007, Thorsfinn Karlsefni fit prisonnier au Vinland deux Indiens qui après avoir appris la langue racontèrent qu’au Nord de leur pays, vivaient des hommes vêtus de blanc qui, certains jours, avec de grands morceaux d’étoffe attachés à des perches, sortaient en procession en criant très fort. Bizarre, non ? Autre anecdote : les inventaires réalisés en 1307 suite à l’arrestation des Templiers ne mentionnent aucune quantité importante d’armes. L’Ordre prenait en charge cette dotation aux nouveaux chevaliers, donc il devait y en avoir un stock. Comme par hasard, Edouard, roi d’Angleterre, se plaint à cette époque que les rebelles écossais en reçoivent des livraisons conséquentes. D’où viennent-elles ? En 1309, l’ordre d’arrestation parvient enfin en Ecosse. Seulement, ce pays est aux mains de Robert le Bruce, le rebelle. Celui-ci, déjà excommunié, n’exécutera jamais cet ordre et on le comprend ! En 1314, le 24 juin, se déroule la bataille décisive entre Anglais et Ecossais. Ces derniers, en infériorité numérique, sont sur le point d’être débordés lorsqu’ils reçoivent l’aide inespérée de chevaliers en armes débarqués il y a peu. C’est une victoire et l’Ecosse acquiert vite son indépendance. Pour terminer, que sait-on vraiment de Christophe Colomb ? Le fait est qu’il a eu beaucoup de mal à convaincre certains puissants de l’époque de l’aider à traverser l’océan. L’Ordre du Temple, dissous par Clément V va renaître sous le nom d’Ordre du Christ. Et la fille de grand maître épousera le navigateur… Selon nos connaissances ou celles que l’on veut bien nous dispenser, l’on a donné le nom d’Amérique à cause du prénom d’un certain Amerigo Vespucci. N’y aurait-il pas une autre hypothèse ? Christophe Colomb savait qu’il se trouvait un continent inconnu au-delà des mers. Le continent pouvait être découvert en suivant l’Etoile du Matin appelée depuis l’Egypte ancienne Merica. Ce nom de Merica est repris par d’autres communautés spirituelles ou philosophiques comme Qûmran et les Nazoréens. Pour conclure, enfin, il n’existe nulle part aucun écrit de quelque pays que ce soit (à moins qu’il y ait rétorsion…) relatant l’arrivée d’une flotte des Chevaliers au Blanc Manteau. Ni en Occident. Ni même en Orient. Si cela s’était produit, nul doute que l’Orient aurait eu beau jeu de se moquer des puissances chrétiennes voulant détruire les bateaux et leurs pires ennemis. L’on ne connaît aucun nom de commandant de navire alors que les archives livrent petit à petit les noms des chevaliers. Pourquoi ? Il semblerait que la raison en soit simple : les navires étaient dirigés par des sergents dont, malheureusement, l’histoire n’a pas retenu le nom, aucun d’entre eux ne devant être « noble » ou avoir accompli un exploit digne d’être relaté.

Méditerranée, Manche, Baltique, Atlantique ont vu leurs eaux sillonnées par des navires templiers.

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